Le premier essai sur la Seine du prototype, le 16 juin dernier, avait pourtant totalement conquis la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui avait pris place à bord. Le genre de soutien qui, habituellement, se révèle déterminant. Coup de théatre, les deux créateurs de ce petit bateau, Alain Thébault et Anders Bringdal, ont annoncé le 20 octobre qu’ils n’avaient pas pu trouver d’accord pour s’implanter dans la capitale.
Les Sea Bubbles sont des bateaux à propulsion électrique reprenant le principe de l’hydroptère développé jadis par Alain Thébault sur son bateau à voile (voir l’article publié sur invention-europe en 2016). Ils sont munis de « foils », sorte d’arcs en fibre de verre, immergés qui, grâce à la vitesse, maintiennent le bateau hors de l’eau à quelque 50 cm au-dessus des vagues d’où leur surnom de « taxis volants ». Capables de relier le musée d’Orsay à la Tour Eiffel en quelques minutes, ces navettes devaient incarner à la fois l’innovation et la protection de l’environnement si chère à la maire de Paris.
Mais, faute d’accord avec le port autonome de Paris qui fixe les règles d’utilisation des pontons et autres zones portuaires, les deux entrepreneurs ont finalement choisi les rives du lac Léman pour se lancer. Alain Thébault accuse le port autonome de Paris d’appliquer « des règles mises en place il y a 140 ans pour les péniches Freyssinet ». Le port autonome rétorque que « les règles sont les mêmes pour tous » notamment les tarifs d’amarrage. Les « essais sont ajournés » à Paris, a encore indiqué le navigateur, « on ne va pas continuer à pédaler dans le vide en passant des mois à discuter avec les administrations ». Selon Alain Thébault, le port autonome de Paris propose des pontons pour 1.000 euros par jour et sans aucun branchement alors que deux communes suisses leur disent « on va financer vos infrastructures ».
Les limitations de vitesse sur la Seine ont également été un frein à l’exploitation des « Sea Bubbles » à Paris car elles aussi semblent totalement non négociables alors que le principe des hydroptères impose une vitesse minimale pour pouvoir fonctionner, bien loin de la vitesse prévue pour les péniches.
L’invention intéresse à l’étranger. Les deux fondateurs ne cachent pas leur fierté d’avoir des demandes du monde entier : « Detroit, Miami, Seattle, San Francisco aux États-Unis, Tokyo, 15 villes en Inde, Bangkok… ». Dubaï serait également très intéressée. Sea Bubbles, c’est « zéro bruit, zéro vague et zéro émission de carbone », expliquent les inventeurs, convaincus que le « futur de la mobilité vient de l’eau, une voie naturelle et historique au cœur des villes, trop longtemps sous-estimée. »
Pour voir des Sea Bubbles, il faudra donc vous rendre à l’étranger. En avril prochain, une ligne pilote sera installée entre Genève et une commune voisine. Cinq « bulles », intégrées au réseau de transport, serviront de taxis à la demande. Quant à Paris, « on y reviendra », a dit l’inventeur sans plus de précision.