Un document de travail du cabinet de Pascal Lamy, commissaire européen au Commerce, établit un diagnostic sur le phénomène des délocalisations en Europe et suggère des remèdes.
Selon ce texte, l’économie européenne est toujours créatrice d’emplois, avec un solde positif net de 25 millions en 20 ans. La production industrielle a même augmenté de 40%.
Certes, l’industrie a perdu 7 millions d’emplois mais les services en ont créé 36 millions.
L’excédent commercial industriel européen s’est accru de 36 milliards d’euros sur les cinq dernières années, grâce « au dynamisme de nos exportations de produits de haut de gamme », relève le texte.
Le recul industriel est concentré dans un nombre limité de secteurs, représentants 7% de la production industrielle (cuir, textiles, habillement, construction navale, etc.).
On assiste en fait à une « recomposition permanente du tissu industriel » européen, les créations d’emplois nouveaux équilibrant les destructions d’emplois anciens. « L’effet net est un solde précaire: en moyenne, depuis 1979, les destructions représentent 15% des emplois et les créations 15,5% ».
Les délocalisations recouvrent une « réalité multiple qui appelle des réponses différenciées ».
L’investissement industriel dans les pays à bas salaires ne représente « que 5% du stock d’investissement étranger d’un pays comme la France ». En outre, « le principal déterminant des localisations n’est pas le coût du travail mais la proximité de la demande finale ». L’investissement à l’étranger permet d’ouvrir de nouveaux marchés. Il est donc bénéfique. Par ailleurs, l’investissement étranger en France représente lui 2,3 millions d’emplois, 30% du total dans l’industrie.
Les délocalisations représentent toutefois un défi immédiat, « celui de la gestion du changement » pour les catégories les plus menacées, les salariés les moins qualifiés.
« Réalité intolérable » en France, le chômage « relève de notre incapacité à profiter des gains de productivité dans l’industrie pour créer plus d’emplois dans les services ». Un déficit évalué à 1,5 million d’emplois en France, par comparaison avec les États-Unis.
Le vrai danger est à plus long terme l’émergence d’une « rupture qualitative dans la logique de la division internationale du travail », avec l’ouverture de grandes économies (Chine, Inde, Brésil) disposant d’une main d’œuvre à bas coût mais ayant accès aux technologies avancées via les filiales des firmes multinationales.
L’industrie européenne, en « équilibre instable », doit donc préserver sa capacité « à vendre du travail cher », dans le haut de gamme. C’est la clef « pour infirmer le sentiment qu’il ne reste plus aux travailleurs européens qu’à travailler plus pour gagner moins ».
Elle doit se redéployer de toute urgence vers les zones les plus dynamiques de la planète, pour bénéficier de leur demande. « Nous avons intérêt à investir sur ces marchés pour y être présents », selon le document.
Sans négliger les armes défensives (anti-dumping, anti-subventions, défense de la propriété intellectuelle), l’Europe doit surtout rechercher un « sursaut technologique ». D’où la proposition de la Commission de doubler, voire tripler le budget des politiques européennes en formation, recherche et innovation dans les perspectives financières 2007-2013.
Source : AFP
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