Des noms et des inventions


Ils ont donné le patronyme de leur famille à un objet d’usage courant dans la vie quotidienne. Pour l’inventeur, cela signifie gloire personnelle. Pour leurs héritiers, une fortune à gérer, à entretenir ou rien du tout. Exemples.

Les descendants de l’Allemand Rudolf Diesel et ceux de l’ingénieur en bâtiment américain Roy Jacuzzi, qui a mis la baignoire à bulles à New York (1968) pour soigner ses propres douleurs articulaires, gèrent les royalties de leurs ancêtres. Ces créateurs avaient pris la précaution de faire breveter leurs découvertes à titre personnel. Depuis les pétroliers et les fabricants de jacuzzi versent à leur descendance des droits d’exploitation âprement négociés et renégociés. Tant que les camions roulent au diesel et les bains bouillonnent, les dollars tombent par millions.

Invention tronçonnée

Les petits-enfants d’Andreas Stihl, eux, exportent encore des tronçonneuses dans le monde entier mais doivent pour cela entretenir la réputation et la qualité de la marque. La Stihl aurait pourtant pu devenir une invention. L’entreprise d’Andreas fabriquait à Stuttgart des foyers de combustion pour les chaudières à vapeur. Jusqu’au jour où, en 1926, sollicité par les bûcherons de la Forêt-Noire et soucieux de leur rendre service, Stihl sort de son usine une scie à chaîne électrique. Elle est quasi inutilisable sur le terrain puisqu’il est impossible de recharger son moteur. L’année suivante, Andreas Stihl introduit un moteur à essence. L’engin qu’il baptise par modestie machine à abattage d’arbres devient une marque déposée et brevetée ? Pas une invention. La tronçonneuse Stihl est donc placée en concurrence avec tous les « imitateurs » et autres fabricants de la machine à abattage d’arbres qui de par le monde reprennent le concept. L’héritage est en quelque sorte tronçonné.

Reconnu comme l’inventeur du célèbre blue-jeans Denim en 1853 à San Francisco en pleine ruée vers l’or, Levi Strauss a dû lutter toute sa vie contre une concurrence farouche. Pourtant, il a fait breveter son pantalon en toile de Nîmes et à poches rivetées en 1873. La fameuse étiquette en cuir placée au dos avec le dessin symbolisant et la résistance de la toile de Nîmes lui procurent un avantage sur la concurrence depuis 1886. Mais le pantalon et le rivet existaient avant Levi Strauss. Ses quatre neveux ont récupéré l’affaire, ils ont dû batailler à la fois devant les tribunaux et sur le terrain commercial pendant un demi-siècle pour se préserver des contrefaçons et maintenir l’image de marque de qualité. Leur fortune a dû être partagée avec… leurs avocats et leurs distributeurs.

La route de l’infortune

La famille Mc Adam ne tire aucun profit de l’invention de son ancêtre John Loud, un ingénieur écossais. Au milieu du XIXe siècle, il fait couvrir les routes britanniques d’une couche de 15 centimètres de pierres de calibre décroissant. La vitesse des malles-poste est doublée, le nombre d’ouvriers pour faire une route abaissée de moitié. L’Amérique, l’Allemagne, l’Italie adoptent sa technique. Seule la France, accrochée à une technique d’empierrement classique résiste. Quand la voiture se développe au début du XXe siècle, le macadam se généralise et se couvre d’une couche de bitume ou de goudron à base d’hydrocarbures pour faciliter le roulement et éviter la poussière. Seulement voilà, John Loud McAdam est au service de la couronne, pas de sa propre entreprise. Il finit ses jours modestement et paisiblement. Sur son testament, figure cette phrase : « J’espère avoir vécu en étant utile au monde ». À défaut d’être richissime…

Auteur : Pascal JALABERT

Source : www.vosgesmatin.fr


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