Suisse / Les PME ont aussi intérêt à breveter leurs inventions


De nombreuses entreprises vaudoises ont des «secrets» à protéger de la concurrence.

Certaines inventions peuvent modifier le cours de l’histoire. D’autres, non. D’un point de vue économique, peu importe : chaque nouvelle idée vaut potentiellement de l’or. «Tout un pan de l’économie vaudoise est concerné par la propriété intellectuelle. Dans des secteurs très variés, comme le domaine des machines, de l’informatique, de l’alimentaire, du design et même des flacons de parfum», souligne André Roland, associé gérant de la société éponyme de conseils en propriété intellectuelle, sise à Lausanne, qui dessert plus de 550 clients, en Suisse et dans le monde.

La plupart des entreprises susceptibles de déposer des demandes de brevets, ou plus largement, des titres de propriété intellectuelle, (marques ou design industriel) sont d’envergure internationale. On pense bien sûr à Nestlé, Logitech, le secteur de la pharmaceutique. Sans oublier les marques horlogères, et les start-up implantées dans des pôles technologiques, comme le Parc scientifique de l’EPFL.

Pourtant, la majorité des entreprises vaudoises sont des PME. Elles aussi sont concernées par cette problématique. C’est d’ailleurs à elles que s’adressent actuellement plusieurs séminaires*, dans lesquels intervient André Roland. Qu’ils soient organisés par le service de promotion économique du canton ou par des sociétés privées, telle Interforum. Quelques cas sont emblématiques des enjeux posés par la propriété intellectuelle. Certains sont même carrément insolites.

Une patate très spéciale

Par exemple celui de la pomme de terre amandine. En 1999, cette variété française est introduite dans la région lémanique par l’Association des producteurs de pommes de terre nouvelles de l’arc lémanique (APNAL). Cette variété étant protégée par un certificat d’obtention végétale, l’APNAL a obtenu l’exclusivité de sa production en Suisse.

Les consommateurs ont adoré. Les producteurs et détaillants aussi : l’amandine est apparue partout. Le hic, c’est que seule la Migros détenait l’autorisation de la vendre. Les «copieurs», naïfs ou rusés, se sont trouvés visés par une plainte de l’APNAL.

Dans un autre registre, on peut citer encore le bras de fer qui a opposé Eric Favre, l’inventeur du café conditionné en capsules, et Nestlé. L’ingénieur, qui intervient aussi dans des séminaires, a été le premier directeur de Nespresso, aux premières heures de la filiale, en 1986. Il l’a quittée peu après, en 1989. En 1991, Eric Favre a obtenu un brevet pour exploiter une nouvelle version de la capsule. La spécificité de la variante Monodor est de remplacer l’aluminium par du polypropylène incinérable, plus écologique. Cette deuxième invention est à l’origine d’une série de procès, qui ont abouti en 2003 à une convention signée entre les deux parties. Depuis, Monodor, qui emploie environ 40 personnes à Saint-Barthélemy, a déposé 6 brevets, séduit des partenaires de taille « Lavazza et Migros » et travaille avec des fournisseurs dans le monde entier.

Même une nouvelle recette de pain est brevetable, comme le rappelle la success story du Paillasse, dont la recette appartient au Genevois Aimé Pouly. Suscitant un tel engouement qu’on le trouve désormais dans nombre de boulangeries vaudoises. Mais pour avoir le droit de fabriquer et de vendre ce pain, il faut disposer d’une franchise et payer 2000 francs. Grâce à son brevet, Aimé Pouly, touche des «royalties», gagnant 10 centimes par pain vendu. Par ses concurrents.

* www.petitsdejeuners-vaud.ch et www.interforum-events.ch

Auteur : Katarzyna Gornik

«Pour une start-up, c’est un gage de sérieux»

Voitures hybrides et électroniques: l’avenir de l’industrie automobile se joue sur une approche écologique des transports et implique la production de batteries au lithium (Lithium-ion), mais avec des batteries nettement plus importantes que ne le permet la technologie actuelle. Pour les constructeurs, la conception d’équipements pour stocker l’énergie est un véritable casse-tête. Meilleure autonomie, meilleures performances, moindres poids et coûts. Voilà justement le créneau de High Power Lithium (HPL). La start-up née au sein de l’EPFL occupe une dizaine de chercheurs et a déjà déposé 9 brevets, dont 3 en partenariat avec Toyota, son plus important mandataire. La «botte secrète» de HPL : une nouvelle génération de batteries au lithium, recourant à des nano-structures et utilisant du phosphate de manganèse au lieu d’une cathode à base de cobalt, utilisée actuellement. Un procédé qui permet à la batterie au Lithium-ion de remplacer les technologies à base de nickel-métal hydrure des voitures hybrides. En brevetant leurs découvertes, les chercheurs de HPL garantissent leur avenir. Car, rappelle James Miners, l’un des dirigeants de la start-up, le but d’une jeune pousse est d’intéresser investisseurs et acheteurs. «C’est un gage de sérieux. Un brevet donne l’assurance d’investir dans une technologie et une ligne de production. Et peut bloquer les concurrents susceptibles de commercialiser un même produit».

Se protéger à moindre coût

Comment savoir s’il vaut la peine de breveter une invention ? Le premier souci des petites sociétés est le coût de la démarche.

«Les brevets font partie du patrimoine d’une société. Ce sont des actifs», rappelle André Roland. «Mais il est vrai que pour un brevet valable dix ans dans une dizaine de pays, on atteint vite plusieurs dizaines de milliers de francs. Pour un petit inventeur, c’est cher.» Il existe toutefois une solution minimisant les frais pendant la phase initiale de protection.

«Pour 1000 à 1500 francs, on peut faire une réservation pendant un an. Cela n’assure pas une protection équivalente à un brevet, celle-ci intervenant ultérieurement, mais la réservation est valable quasiment dans le monde entier.» Pendant ce laps de temps, à l’inventeur de s’activer pour trouver des investisseurs et se donner les moyens dont il a besoin pour devenir propriétaire de sa trouvaille.

Le chiffre de la semaine

C’est le nombre de demandes de brevets déposées depuis la Suisse auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle en 2007, indique David Borel, de Centredoc (société neuchâteloise spécialisée dans la veille technologique pour les entreprises). Il est a priori impossible de déterminer leur nombre à un niveau cantonal. «Il n’existe pas de statistiques pour une région géographique d’une taille inférieure à un État.» Un brevet est un titre de propriété s’appliquant au domaine industriel. Il bloque l’exploitation commerciale d’une invention par des tiers. Un brevet est valable vingt ans dans un pays, voire un groupe de pays. En contrepartie, le déposant accepte de publier son «secret». Après vingt ans, l’invention tombe dans le domaine public.

Source : www.24heures.ch


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