Joseph Davidovits : 10 M € pour préparer l’avenir


A 73 ans, le scientifique saint-quentinois Joseph Davidovits est en passe de faire mentir le fameux adage « nul n’est prophète en son pays ». Ce chercheur, mondialement connu et reconnu pour ses travaux sur les géopolymères, détient peut-être les clés de l’après pétrole. Inventeur de la chimie des géopolymères sans carbone dans les années 70, il est aujourd’hui cité comme « la » référence par l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Ses minéraux sans carbone pourraient se substituer demain aux plastiques d’origine pétrolière. Le chercheur en appelle aux politiques pour créer un pôle d’excellence à Saint-Quentin.

Chercheur au parcours hors norme, professeur aux États-Unis, il donne depuis des décennies des conférences un peu partout dans le monde, il avait ces dernières années fait la une de l’actualité avec ses recherches sur la construction des pyramides.

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Joseph Davidovits en appelle aux politiques pour créer un centre de recherche à Saint-Quentin.

Joseph Davidovits avait lancé un véritable pavé dans la marre en affirmant aux égyptologues que les pyramides n’avaient pas été construites en pierres taillées par des esclaves suant sang et eau, mais avec des pierres reconstituées. Des pierres calcaires réalisées comme du béton avec des matières récupérées sur les bords du Nil lors de sa décrue.

Ses travaux sur les géopolymères – des matières minérales obtenues par des procédés chimiques réalisés naturellement – ont abouti à une géosynthèse aux propriétés similaires aux plastiques dérivés du pétrole, mais sans solvant dangereux, ne brûlant pas et ne dégageant ni gaz ni fumées toxiques. De surcroît comme des pierres, ces matières résistent aux agressions chimiques, au temps et permettent une production non polluante.

Une chimie utilisée aujourd’hui entre autres dans l’automobile, l’aéronautique, la défense, pour les prothèses osseuses, les membranes de piles à combustible, dont les ciments, sans dégagement de gaz à effet de serre, ont été utilisés par les troupes américaines durant la guerre du Golf.

Bref, des recherches utilisées par plus de 300 laboratoires dans le monde, mais peut-être trop en avance sur leur temps, puisque Joseph Davidovits était contraint faute de moyens il y a quelques mois, à fermer son laboratoire de la cité des Pastels. « Depuis 2 ans nous n’avons eu aucune commande », confesse le scientifique.

Pas décidé pour autant à pantoufler malgré ses 73 printemps, Joseph Davidovits n’espérait pourtant pas être de retour aussi vite sur le devant de la scène. Le 18 mars dernier, la commission de l’assemblée nationale des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, puis quelques jours plus tard, l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques le mettaient à l’honneur dans un rapport sur l’évaluation de la stratégie nationale de recherche en matière d’énergie.

Les rapporteurs souhaitent que l’Institut français du pétrole, établissement public financé par l’État, anticipe la disparition des hydrocarbures fossiles en ouvrant et finançant de nouveaux chantiers et citent la piste des plastiques minéraux sans carbone du Saint-Quentinois soulignant son incontestable expérience.

10 M€ pour un pôle d’excellence à Saint-Quentin

« L’Institut français du pétrole (IFP) est financé par l’État qui est actionnaire de Total. Les politiques ont donc un réel pouvoir de décision pour que l’IFP ouvre et finance un centre de recherche, un pôle d’excellence à Saint-Quentin. Nous sommes les seuls à avoir ses compétences. C’est l’occasion de sortir des schémas classiques de la région : agriculture, textile, industrie ». Pour Joseph Davidovits les 10 M€ nécessaires à ce laboratoire ne pèsent qu’une goutte d’eau au regard des 14 milliards d’euros de bénéfices réalisés l’an dernier par Total.

« Valenciennes s’est doté d’un centre de recherche dans les matériaux qui a acquis une renommée internationale, c’est lui qui a incité Toyota à s’y implanter. Ce ne sont pas les ingénieurs formés à l’UTC de Compiègne qui ont fait se développer la zone d’activité, ce sont les travaux du centre de recherche. La décision est politique, si elle est prise il y aura des emplois derrière », conclut Joseph Davidovits, prêt à soulever des montagnes pour parvenir à ses fins.

Auteur : Erick LESKIW

Source : www.aisnenouvelle.fr


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