René Jacquinet a été militaire pendant vingt-trois ans dans les Transmissions. Son métier, il l’a exercé en Mauritanie, en Roumanie et en Allemagne. Rien de très original ? Si, puisque derrière un physique de « Monsieur tout le monde » se cache un ex-agent de renseignement. Sa carrière, il l’a commencée comme agent de liaison, puis attaché d’ambassade et enfin agent de renseignement. S’il peut parler aujourd’hui, c’est que « les méthodes et les matériels ont changé… et que tout n’est pas secret. » Rencontre.
L’homme est de taille moyenne, sans signe distinctif, ni physique ni dans l’allure. Pourtant, il cultive le mystère. S’il parle librement de certains épisodes de l’activité qu’il a exercée de l’autre côté de la frontière, il sort de son portefeuille des papiers écrits en cyrillique russe, puis d’autres, en allemand, où l’on ne peut déchiffrer que son patronyme : René Jacquinet, né en 1948.
Originaire de l’Avesnois, il a commencé sa carrière militaire comme transmetteur en Allemagne avant de rejoindre la France et le centre de transmissions gouvernemental pour assurer les liaisons vers les ambassades de France. Il a ensuite été détaché à l’ambassade de France en Mauritanie, puis en Roumanie sous l’ère Ceaucescu (de 1980 à 1983). Il possédait un passeport diplomatique(détaché par la France auprès du ministère des Affaires étrangères) et assurait les liaisons de chiffres vers la France.
Il est ensuite retourné en Allemagne (en 1983), à Trêve, avant d’être affilié à Berlin de 1986 à 1989. Il a pu entrer dans le renseignement grâce à ses connaissances linguistiques et à son expertise dans les armes (nucléaires, biologiques et chimiques). Il a été formé à l’école interarmées du renseignement et des études linguistiques à Versailles. À Berlin, il a rejoint la MMFL (Mission militaire française de liaison). « J’ai quitté l’armée pour le service de la sûreté du gouvernement militaire français de Berlin comme interrogateur de transfuges des pays de l’est. » Pour se faire, il a obtenu une carte d’identité russe (un laissez-passer en zone soviétique). « Pour passer à Berlin ouest, les gens avaient besoin de notre tampon sur leurs papiers ; il leur fallait notre accord. » Alors René Jacquinet exerçait un chantage pour obtenir des renseignements politiques, économiques et sociaux « mais pas militaires ». « On exerçait une pression psychologique mais, vous savez, ils racontaient ce qu’ils voulaient… Je n’ai pas récolté beaucoup de choses intéressantes. » Des anecdotes, des épreuves, il en a tant en souvenirs qu’il est intarissable sur le sujet ; des « collègues morts pour leur pays », sûr qu’il en a connu et il n’oublie jamais de les citer.
Un peu après la chute du mur, René Jacquinet a été contacté par un groupe industriel de la région parisienne pour assurer la mise en place d’un service de propriété industrielle et d’intelligence économique. Il a changé de métier, « mais en restant toujours au fait de ce qui se passait dans le monde ». Il a effectué de nombreuses missions à l’étranger, en Asie, au Moyen-Orient… et a fréquenté les salons d’armements (qui ont lieu tous les deux ans). Aujourd’hui, René Jacquinet est à la retraite dans l’agglomération roubaisienne mais il ne sait pas quitter son autre vie. Aussi, il forme à l’intelligence économique et anime des conférences sur la réunification de l’Allemagne… bénévolement.
Auteur : MARIE-CLAUDE GUILLEMENT
Source : www.lavoixdunord.fr
En savoir plus sur Invention - Europe
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.
