Le Protocole de Madrid


Dans le monde de la propriété intellectuelle, nul n’ignore l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques en date du 14 avril 1891 ( « l’Arrangement de Madrid » ). Pendant plus d’un siècle, il a eu comme unique fonction celle d’être le meilleur instrument international pour la protection des marques dans le monde entier.

Il est également très connu qu’un certain nombre des changements survenus à l’Arrangement furent nécessaires. Les principaux changements étaient cependant destinés à permettre aux pays de langue anglaise, ainsi qu’aux organisations intergouvernementales possédant des offices régionaux des marques, de pouvoir devenir parties à cet important accord international.

Le Protocole relatif à l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement des marques, ci-après cité comme « le Protocole de Madrid », fut adopté à Madrid le 27 juin 1989. Il contenait certaines modifications techniques relatives à l’Arrangement de Madrid: en particulier le délai de 12 mois, le niveau peu élevé des frais, et les règles relatives à l’attaque centrale, qui ne seront pas traité ici. Toutefois, les changements les plus importants furent l’introduction de la langue anglaise dans les règlements d’exécution parallèlement à la langue française déjà utilisée, ainsi que la possibilité pour les organisations internationales intergouvernementales, telle que la Communauté européenne, de devenir parties au Protocole.

Depuis son entrée en vigueur, le Protocole de Madrid fut un immense succès. Aujourd’hui 57 Etats sont parties contractantes.

Le Protocole dispose que la Communauté européenne, une fois devenue partie contractante, aura le droit de voter en son propre droit, à l’assemblée de l’Union de Madrid, en plus des votes des Etats membres. Cela généra certains problèmes avec les Etats-Unis, qui s’opposèrent au fait que les Etats membres de la Communauté européenne aient 15 votes et que la Communauté européenne en tant que telle puisse avoir un seizième vote.

Cette distribution de votes est basée sur le fait que la Communauté européenne a son propre système de marque déposée géré par « l’Office d’harmonisation dans le marché intérieur ». Cet Office est totalement indépendant des autres offices de propriété intellectuelles dans les Etats membres. L´attention fut attirée sur le fait que la Communauté européenne, en tant que partie contractante, devrait bénéficier des même droits et obligations que toutes les autres parties contractantes.

Pendant plusieurs années, cette situation engendra un obstacle politique à l’adhésion des Etats-Unis au Protocole de Madrid. Finalement, et à la suite de pressions exercées par des groupes de lobby américains et européens, un « gentleman’s agreement » politique aboutit entre les Etats-Unis et la Communauté européenne.

Tous les efforts seraient fournis afin de prendre des décisions à l’assemblée de l’Union de Madrid par consensus plutôt que par vote. Néanmoins, si un vote devait s’avérer nécessaire, la Communauté européenne s’abstiendrait volontairement d’exercer son droit de vote lorsque son vote correspondrait à ceux donnés par ses Etats membres.

Finalement les Etats-Unis signèrent le Protocole le 2 novembre 2002, et leurs instruments de ratification seront probablement déposés le 2 novembre 2003. Si tel est le cas, le Protocole de Madrid entrerait en vigueur aux États-Unis le 3 février 2004. Un autre scénario serait le dépôt des instruments de ratification le 2 août 2003 et, par conséquent, le traité entrerait en vigueur le 3 novembre 2003.

Etant donné que le Japon, la Russie, la Corée du Sud, l’Australie, les Etats membres de la Communauté européenne et un grand nombre d’autres Etats sont déjà parties contractantes du Protocole de Madrid, il est évident que le Protocole est devenu un instrument très important quant à l’obtention internationale d’une protection pour les marques déposées.

L’adhésion de la Communauté européenne au Protocole de Madrid serait de très grande importance, et constituerait un accomplissement significatif dans le domaine de protection internationale en propriété intellectuelle. Le propriétaire d’une marque communautaire, pourrait, sans avoir besoin d’acquérir une marque nationale (comme c’est le cas aujourd’hui), obtenir un enregistrement international, et inversement, un enregistrement international pourrait être étendu à la Communauté européenne.

En 1996, la Commission présenta au Conseil de l’Union européenne une proposition de Décision du Conseil approuvant l’adhésion de la Communauté européenne au Protocole relatif à l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques ( JOCE C/293/1996 p.11 du 5 octobre 1996), ainsi qu’une proposition de Règlement du Conseil modifiant le Règlement (CE) No 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire afin de donner effet à l’adhésion de la Communauté européenne au Protocole relatif à l’Arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques (JOCE No 300/1996 p.11 du 10 octobre 1996).

Bien que les Etats Membres se soient déclarés, en principe, en faveur de ces deux actes législatifs, et par conséquent en faveur de l’adhésion de la Communauté européenne au Protocole de Madrid, l’adoption de ces actes législatifs n’a pas été possible pour des raisons politiques et techniques, se rapportant principalement à la clause de l’ « opting-back » et au système de langues. Après les efforts considérables mais sans succès du Royaume-Uni, lors de sa présidence dans la première moitié de l’année 1998, aucunes autres actions supplémentaires ne furent entreprisses par les présidences qui suivirent. Il semble désormais que les autorités espagnoles, qui étaient très concernées par la clause de l’ « opting-back » sont prêtes à retirer leurs objections. La raison principale semble être le fait que l’OMPI ait proposé d’inclure l’espagnol comme langue de travail du système du Protocole de Madrid lors de l’assemblée de l’Union de Madrid en septembre 2002. L’assemblée accueilla favorablement cette proposition, et une décision positive est attendue pour septembre prochain.

Il apparaît également que les objections soulevées par les autorités belges, à l’encontre du régime linguistique des cinq langues de l’Office d’harmonisation du marché intérieur, ne sont plus aussi vigoureuses qu’elles ne l’étaient cinq ans plus tôt.

En conclusion, nous considérons que la présidence grecque et la présidence italienne devront faire tous les efforts possibles afin d’assurer l’adhésion de la Communauté européenne au Protocole de Madrid pour la fin de cette année. C’est dans l’intérêt des entreprises, de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur, et de la communauté internationale, que le plus grand nombre de parties possible adhéraient au protocole de Madrid. La protection des droits de la propriété industrielle est une garantie de progrès et développement pour nos pays.

Oreste Montalto
Avocat et anciennement Directeur du département juridique de l’Office d’harmonisation dans le marché intérieur

Source : www.ipr-helpdesk.org


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