Recherche et innovation : casser les poncifs


Comparer l’effort d’innovation de l’Europe et des États-Unis est une vieille affaire, qui se termine toujours par le même constat de retard, mesuré par les dépenses R&D comparées au PIB. Une fois n’est pas coutume, un rapport récent – de l’association INSME – ouvre des pistes moins négatives, cassant certains poncifs et insistant sur la nécessité d’une nouvelle politique industrielle.

La connaissance, en tant qu’objet épistémologique, a des caractéristiques intéressantes : un accès non contraint (avoir une idée n’oblige pas les autres à l’avoir aussi) ; un coût original élevé de création; un coût marginal de diffusion, ce qui rend difficile d’empêcher les autres d’y accéder (à part les copyrights et brevets) ; une incertitude fondamentale sur ce qu’on attend réellement des résultats de la recherche ; un effet retard entre la découverte originale et ses applications. La connaissance scientifique et technologique a aussi cette caractéristique de se développer de manière itérative, implicite, en utilisant en permanence le savoir préalable disponible.

Les auteurs du rapport militent ainsi pour une « open science », faisant le parallèle avec le logiciel « open source ». En outre, nombre d’innovations sont apparues avant leur formalisation scientifique, à commencer par le moteur à explosion. A l’inverse, des progrès scientifiques n’ont pu être accomplis sans l’invention d’instruments : exemple du microscope.

Établir des indicateurs de mesure fiables des modèles économiques basés sur la science et la technologie n’est donc pas une mince affaire. On retiendra néanmoins que ce rapport bat en brèche certaines idées reçues : le retard de l’Europe n’est pas dû, selon lui, à une difficulté à transformer en applications concrètes des recherches scientifiques d’un niveau élevé. Tout simplement parce que ce niveau élevé est un mythe ! Même la publication d’articles scientifiques, comparée à la population, est en réalité deux fois plus forte aux États-Unis qu’en Europe.

A l’inverse, la comparaison des systèmes éducatifs n’est pas forcément, contrairement là aussi aux idées reçues, à l’avantage des États-Unis. Malheureusement, le transfert est mal exploité : la plupart des résultats scientifiques en informatique de l’Université britannique de Cambridge, reconnus au niveau mondial, sont utilisés par des entreprises non européennes (Microsoft et Fujistsu en tête). Enfin, l’Europe souffre du faible engagement de ses entreprises dans le dépôt de brevets et dans certaines grandes instances internationales, où il faut pourtant absolument être présent. Bref, le diagnostic est bien différent de ce qu’on lit d’habitude sur le sujet.

Conclusion du rapport : l’Union européenne doit renforcer son aide à la recherche fondamentale, différencier son système éducatif entre recherche et technique, accroître la recherche publique davantage source d’innovation en se préoccupant moins d’appropriation, relancer de grands chantiers capables de développer l’industrie européenne. Tout un programme !

Auteur : Luc Fayard, Directeur de la rédaction de 01 DSI.

Source : www.01net.com


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