Je voudrais vous faire part de deux histoires amusantes concernant les inventeurs, histoires toutes les deux authentiques, dont l’une m’est tout à fait personnelle.
Ensuite, j’expliquerai pourquoi les concours d’invention et les salons d’inventeurs ne sont pas des endroits fréquentables pour des inventions majeures.
1ère histoire authentique
C’est arrivé dans les années cinquante (19-). Un ingénieur américain soumet un plan de bateau complet à son client armateur qui lui fait part de sa mauvaise humeur parce que le dernier bateau construit a été copié par des japonais pour moins cher.
L’ingénieur dit : « Ha bon ? – Je vais me renseigner et on se revoit. »
Il remballe ses plans, se renseigne et constate les faits : Il a été copié.
A part quelques fioritures, un bateau récent japonais est la réplique exacte du dernier qu’il a fait.
Il identifie sans trop de peine l’armateur japonais et son ingénieur.
Naturellement, il broie du noir pendant quelques nuits, puis lui vient une idée machiavélique, et il retourne à sa planche à dessin.
Quelques semaines après, il soumet un nouveau plan à son armateur, en lui demandant d’en faire une grande publicité, mais, surtout de ne pas le construire…
Il attend -avec l’impatience que l’on devine- quelques mois, puis se rend au Japon pour assister à l’inauguration de sa dernière œuvre d’art, copiée -une fois de plus- par les japonais.
Grande cérémonie !
Tous les politicards du coin sont là, en grande redingote, l’armateur et l’ingénieur japonais aussi.
Et une foule d’employés, d’ouvriers et leurs familles, qui ajoutent joyeusement des petits drapeaux, pendant que le nouveau bateau descend lentement de son lieu de chantier vers l’eau.
Et là : SURPRISE SUR…PRISE !!!
Majestueusement, le bel ouvrage penche sur un côté, inexorablement, et se retrouve, quelque minutes après, avec sa belle quille en l’air.
Imagine la gueule des japonais !!!
L’ingénieur rentre aux US et apprend -un peu honteux quand même de son coup tordu- que son homologue japonais s’est fait hara-kiri…
Plus jamais les japonais n’ont copié ses plans, on le devine sans peine…
2ème histoire authentique et personnelle, cette fois-ci (année 1984).
En forant des trous dans les murs de ma chambre, je constate que la poussière des briques m’embarrasse beaucoup, et j’imagine que cela doit être pire pour un ouvrier qui doit forer dans un plafond.
Je gamberge un peu et dépose quelques mois après un joli brevet très simple, avec de beaux schémas fait à la planche à dessin, rotrings, le truc sérieux quoi.
Cela consistait en un bidule en plastique caoutchouté, troué, à mettre juste devant la foreuse, en laissant passer la mèche, et relié à par un tuyau un aspirateur.
Mais j’hésite à lancer des capitaux dessus, me dit que c’est incomplet, trop léger, et renonce à payer l’annuité du brevet l’année suivante, passant déjà à autre chose de plus ambitieux.
Un an de plus passe, et SURPRISE, en passant devant la vitrine d’un quincaillier, je reconnais ce que j’avais conçu -rien de plus, rien de moins- dans la vitrine.
Je me dis : « Mouais, dommage… Mais pourquoi il n’a pas amélioré ??? »
Il fallait mettre :
– un dispositif pour que mon bidule tienne à la foreuse (un ouvrier n’a pas trois mains !),
– mettre un dispositif d’arrêt,
– et de préférence relier le (long et souple, de préférence) tuyau de l’aspirateur, avec le câble de la foreuse, après quelques mètres, pour faciliter les manipulations.
Je réalise que j’ai été copié PAR UN VRAI CON, et je ne me trompe pas, car les années suivantes, le bidule disparaît des devantures : Le copieur s’est visiblement s’est cassé la gueule au point de vue commercial.
Personne n’a acheté sa marchandise incomplète…
Ce que j’en retire, de cette expérience et d’autres.
Pourquoi les concours d’invention et les salons d’inventeurs ne sont pas des endroits fréquentables pour des inventions majeures.
1°) Ne jamais déposer une invention complète (appelons ABCD, BCD étant des applications directes) en un seul coup.
2°) D’abord déposer B, puis C, puis D, avec des titres assez obscurs, en passant par un ami ou deux, qui signent un petit protocole commercial au cas où.
3°) Attendre quelques mois et déposer le brevet de l’invention A, sans faire référence aux autres, et de préférence via une personne morale, pour que les petits malins qui farfouillent régulièrement dans les nouveautés aient les pires difficultés pour faire le rapprochement. (En effet, quand on parcourt les brevets dans l’ordre des dates, on attrape vite une tête comme un juke-box…).
4°) Toutes les inventions à déposer avec quelques petits défauts difficilement identifiables, mais qui ne peuvent pas faire l’objet d’une amélioration brevetable.
5°) Chercher un commercial de son propre pays et exiger un acompte TRÈS conséquent, en parlant surtout de B, C, D de préférence potentiellement, sans jamais faire référence au brevet de l’invention A, de façon à toujours garder une longueur d’avance sur le partenaire financier qui se révélerait incorrect.
6°) Ne JAMAIS mentionner le brevet de l’invention A à un concours d’invention, et SURTOUT PAS dans une foire aux inventeurs. Ne présenter qu’un petit bidule pratique sans plus, et de préférence pas trop génial… En laissant de petites cartes visites, avec la mention : « J’ai mieux, mais c’est au chaud sous coffre à la banque ». Aux commerciaux & financiers de piger s’ils ne sont trop cons. Et garder quelques bonnes bouteilles à boire en-dessous du comptoir pour entamer les conversations vraiment sérieuses.
Tout cela, parce que voilà ce qui arrive le plus généralement :
Des commerciaux & financiers surveillent les concours et les foires aux inventeurs.
Parfois ce sont des ingénieurs à la recherche d’idées.
Peu importe leurs nationalités.
Ensuite, ils se rendent en Asie (La Chine est devenue un bon terrain pour les investisseurs étrangers), et rajoutent un « petit quelque chose ». Peu importe que ce « petit quelque chose » soie vraiment une amélioration ou pas.
L’important est que cela SEMBLE être une amélioration, que cela diffère quelque peu de l’invention originale, et que cela soie contestable devant des tribunaux pendant des années.
Juste de quoi -avec de gros capitaux- faire beaucoup d’argent, et être à même de payer des avocats internationaux qui feront traîner les choses, et, si les tribunaux sont en Asie, achèteront discrètement les juges.
Tu crois vraiment qu’un inventeur d’envergure microscopique va gagner un procès dans des conditions pareilles, des procédures judiciaires très coûteuses, suivies de voyages coûteux ???
—-PAS COMME CELA, mais en étant machiavélique et très vicieux. !!!—-
Exemples : Un petit vice de construction par ci, un petit boulon un peut trop faible par là, un axe de rotation un peu décentré, un point d’équilibre pas bien placé, des gentillesses de ce genre toutes faites à l’intention d’ingénieurs pressés par le temps et qui sont TOUT… sauf ingénieux.
Je suis paranoïaque, moi ???
Une grande marque automobile japonaise est en train de perdre un quart de milliards de dollars, contrainte à rappeler des véhicules flambants neufs qui menacent de se crasher à tout moment…
Et, bien, ça, moi je pense que c’est un petit malin qu’on a copié, et qui a glissé quelques peaux de bananes en-dessous de ses copieurs.
Quand je vois l’étendue du désastre, je me marre doucement.
Rassurez-vous, ce n’est pas moi.
Peut-être une prochaine fois… J’ai envie de m’amuser un peu, tiens….
Auteur : Jean-Marc LAMBERT (Omeg ALABAB ou Jean-Marc SILSLAM -au choix-)
E-mail: thegreatmonarch@yahoo.com