Le 28 mars 2024, le Tribunal judiciaire de Paris (3ᵉ chambre, 1ʳᵉ section) a rendu une décision importante concernant la brevetabilité des inventions de posologie. Cette affaire, qui portait sur le brevet EP 1 845 961 détenu par la société Bayer, soulève des questions fondamentales sur l’activité inventive et les critères de brevetabilité dans le domaine pharmaceutique.
Contexte de l’affaire
Le brevet EP 1 845 961 revendiquait une posologie spécifique pour le médicament Rivaroxaban, utilisé dans le traitement des troubles thromboemboliques. La posologie proposée consistait en une administration journalière unique, par un comprimé à libération rapide, pendant au moins cinq jours consécutifs. La société Sandoz a contesté la validité de ce brevet, arguant que la posologie revendiquée ne présentait pas d’activité inventive et devait être considérée comme évidente pour un homme du métier.
La question de l’activité inventive
L’activité inventive est un critère clé de la brevetabilité, défini par l’article L. 611-10 du Code de la propriété intellectuelle. Elle exige que l’invention ne soit pas évidente pour un expert dans le domaine concerné. Dans cette affaire, le tribunal a examiné si la détermination de la posologie optimale constituait une véritable innovation ou si elle relevait d’« essais de routine », c’est-à-dire de démarches classiques et prévisibles pour un professionnel.
Le tribunal a conclu que la posologie revendiquée était évidente et ne remplissait pas le critère d’activité inventive. Il a notamment souligné que les tests de posologie et la détermination de la dose optimale sont des pratiques courantes dans le développement de médicaments, et qu’ils ne peuvent être considérés comme une avancée technique significative.
Implications de la décision
Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence plus large concernant les inventions de posologie en France. Elle met en lumière les défis liés à la brevetabilité des méthodes de traitement, qui doivent démontrer une véritable contribution technique pour être protégées. En annulant le brevet EP 1 845 961, le tribunal a également rappelé l’importance de ne pas utiliser les brevets comme un moyen de retarder l’entrée des génériques sur le marché.
Conclusion
L’affaire du brevet annulé pour l’invention de posologie souligne la nécessité d’une évaluation rigoureuse de l’activité inventive dans le domaine pharmaceutique. Elle illustre également les tensions entre les titulaires de brevets et les fabricants de génériques, dans un contexte où l’innovation et l’accès aux médicaments doivent être équilibrés.
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