L’entreprise plutôt que la fonction publique. Le produit et le marché plutôt que la recherche fondamentale. Agnès Paillard, la nouvelle présidente du conseil d’administration de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi), a choisi, très tôt, le monde de l’industrie. C’est toutefois son arrivée en 2011 à la présidence d’Aerospace Valley, l’un des pôles de compétitivité les plus dynamiques de l’Hexagone, qui la font apparaître sur les radars nationaux.
Dès lors, cette sportive fréquente régulièrement Fleur Pellerin et Geneviève Fioraso, qui soufflent son nom à Arnaud Montebourg. « Inattendue », la proposition à l’Inpi la séduit, comme si cette fille d’une infirmière et d’un médecin lyonnais s’y était préparée quand, étudiante déjà, elle délaissa Normale Sup pour l’École supérieure de physique et de chimie industrielle de Paris, alors dirigée par le prix Nobel Pierre-Gilles de Gennes. C’est là que cette dirigeante de cinquante-quatre ans a croisé Thierry Vannier, l’actuel patron de Bull, et Christine Wuest, aujourd’hui numéro deux de la recherche de Saint Gobain, auxquels elle reste très liée. Devenue ingénieur en 1984, elle entre chez IBM « attirée par le côté futuriste » mais en optant pour le service des méthodes pour être « en prise directe avec les impératifs de la production ». Sept ans dans une usine, puis cinq au service achats lui permettent de constater qu’ « il n’existe jamais de position acquise » : de l’intérieur, elle observe le géant se faire balayer du marché du PC dont il n’a pas vu venir la déferlante, avant de perdre sa domination dans la microélectronique pour avoir laissé des technologies clefs à des sous-traitants devenus concurrents.
Scientifique dans l’âme, elle rejoint alors Serma Technologies, une spin-off d’IBM basée à Bordeaux, dont elle prend la direction générale après y avoir été commerciale. Attachée à l’entreprise, elle siège au conseil d’administration. L’occasion de découvrir la stratégie, la finance et de mener une introduction en Bourse : « Je ne connaissais aucun de ces rouages mais je me suis passionnée pour cela », raconte-t-elle. En 2002, en désaccord avec la stratégie, cette femme avenante et souriante, mais qui ne manque pas de caractère, est sur le départ. Histoire de se classer au tennis et de se consacrer davantage à ses trois enfants… Alain Rousset, le président de la région Aquitaine, ne lui en laisse guère le temps : il lui propose le poste de directeur général adjoint chargé de la recherche au conseil régional. « Ce fut la découverte d’un monde inconnu qui m’a intriguée, dit-elle. Je n’avais aucun engagement politique, mais j’ai bien vu qu’il y avait une grande proximité entre le conseil régional et l’industrie. »
Vice-présidente d’EADS
Localement, son passage marquera la politique publique. Parmi ses atouts ? « De grandes qualités relationnelles et de mobilisation », se souvient Jean-Luc Mercadié, à l’époque directeur général des services. « Elle sait écouter. C’est si rare », renchérit Catherine Moutet, qui dirige les Tissages Moutet, devenue une amie. En 2009, soucieuse de retrouver l’industrie, Agnès Paillard accepte la direction générale du pôle Aerospace Valley. Et n’hésite pas, mi- 2011, à démissionner suite à des divergences stratégiques avec son président toulousain, Jean-Marc Thomas. A peine quelques mois plus tard, elle est sollicitée pour en prendre la présidence, qui passe alternativement de la région Midi-Pyrénées à l’Aquitaine. Également vice-présidente d’EADS France, en charge des politiques d’innovation régionales, elle devra désormais lutter pour continuer à lire et à fréquenter les salles obscures. Sans renoncer à soigner son drive sur le golf de Lacanau, où elle a acquis une maison.
Auteur : Frank Niedercorn
Source : www.lesechos.fr
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