Article de presse

Innovation : les ficelles de ceux qui ont toujours un coup d’avance


C’est une obsession, une question de survie presque. Pour ces patrons visionnaires, nourrir un brin de folie et oser prendre des risques sont des moteurs. Et des gages de réussite. Qu’ils cultivent chacun à leur façon.

Ils y pensent tout le temps. Ou presque. Comme une évidence, une composante essentielle de leur métier. « Notre entreprise est née grâce à la mise au point d’une technologie disruptive sans contact, annonce Julien Zuccarelli, directeur général de la PME ASK, qui compte 380 salariés et a mis au point une technologie sans contact utilisée par de grands groupes. Innover est donc dans notre ADN. »

Damien Marc, à la tête de JPB Système, entreprise du secteur aéronautique qui fabrique des systèmes auto-freinants, ne dit pas autre chose : « C’est une pensée quotidienne, un élément clé de la culture d’entreprise », analyse le dirigeant. Mais cette nature profonde s’exercera d’autant mieux si elle est cultivée à bon escient. Et là, chacun à sa méthode. Chez JPB Système, la trentaine de salariés se réunit une fois par semaine pour une intense séance de brainstorming. « Toutes les idées fusent, il n’y a pas de barrières ou de censure, raconte Damien Marc. Nous lançons des idées de nouveaux produits et nous les passons au tamis afin de ne pas nous disperser et de parvenir à tracer des grands axes de travail. »

Chez Acrelec, ETI de l’ingénierie électronique qui a mis au point des bornes de commandes pour la restauration rapide et la grande distribution, on a voulu miser sur un système agile. « Avec 550 salariés, nous sommes une ETI de belle taille mais comme le disait Jeff Bezos d’Amazon : « Une bonne équipe projet c’est pas plus de deux pizzas » donc nous avons créé une start-up en interne pour assurer le pilotage des projets innovants et qui peut réagir très vite », avance Jacques Mangeot. Une équipe à l’affut qui fait évidemment de la veille mais pas seulement.

Canaliser le grain de folie nécessaire

L’innovation, c’est aussi une question de timing. « Il faut être en alerte permanente et savoir lancer son produit au bon moment, sans être trop en avance sinon c’est un échec assuré », poursuit Jacques Mangeot. Un avis partagé par Alain Molinié, PDG d’AwoX, PME spécialisée dans les objets connectés. « Sortir un truc avant tout le monde ne servira à rien si ça n’est pas adossé à un business model solide, si vous ne collez pas au marché. » Le voilà l’autre grand principe de l’innovation réussie et maitrisée : la connaissance du marché ou du client et de ses besoins. Pas question de pratiquer des travaux de pure recherche un peu hors-sol! Il faut sans cesse penser marché et ajuster la proposition en fonction de celui-ci. « Nos idées ce sont les problèmes des clients et des magasins que nous équipons et auxquels nous tentons de répondre le plus rapidement et le plus précisément possible », pointe Jacques Mangeot d’Acrelec.

Pour les entreprises industrielles, le délai de réponse est parfois plus long qu’escompté. « Nous ne sommes pas une start-up mais une PME de l’industrie avec sa temporalité propre, rappelle Julien Zuccarelli d’ASK. Il ne s’écoulera pas moins d’une année pour qu’un produit soit mis au point et atteigne son marché. » Pour éviter de cruelles et parfois coûteuses déconvenues, l’entreprise blinde le processus en amont. « C’est toujours le département R&D qui donnera le go pour la feuille de route du produit », poursuit le chef d’entreprise.

Car l’innovation est un processus collectif, de concertation et d’émulation. Un processus qui dépend donc beaucoup des équipes mobilisées. « Je veille à assurer un mélange des âges au sein de mon équipe d’ingénieurs afin d’associer des jeunes à la vision plus débridée, plus folle et des profils plus confirmés, capables de (re)cadrer les choses si le grain de folie s’égare un peu trop », estime Damien Marc. Au-delà de l’hétérogénéité des profils, le chef d’entreprise s’efforce aussi d’insuffler un esprit particulier. « Je leur répète que l’échec est possible et ne doit pas être trop redouté, qu’il est important d’oser et d’essayer. Pour rester en tête, il faut de toute façon sortir de sa zone de confort. » En clair, il faut se donner les moyens.

« Un risque qui en vaut la peine »

Des moyens qui sont à la fois humains et financiers. « J’aimerais bien que mes ingénieurs puissent tous consacrer 20% de leur temps à innover mais c’est impossible nous sommes une entreprise trop petite, estime Alain Molinié. L’homme se montre très réservé et ne détaille pas les sommes allouées plus ou moins directement à l’innovation. Chez Acrelec, on consent juste à dire que « tous les bénéfices sont réinvestis pour les futurs projets de pointe. »

Seul Damien Marc de JPB Système, affiche la couleur et avance quelques chiffres : entre 600 000 et 700 000 euros sont engagés dans l’innovation. « Cette somme comprend à la fois aux dépôts de brevets, à l’amortissement du matériel et aux heures de travail des équipes d’ingénieurs, raconte le chef d’entreprise. C’est 10% du chiffre d’affaires donc ça n’est pas négligeable et on peut se dire que c’est peut-être dispensable mais je ne le pense pas. Grâce à cette politique là, on se donne une visibilité de dix-quinze ans. C’est un risque qui en vaut donc la peine surtout avec un outil comme le CIR. »

Trois des quatre entrepreneurs interrogés ne tarissent pas d’éloges sur le dispositif d’aides à l’innovation disponible en France. Exception faite de Jacques Mangeot qui regrette que celui-ci comporte « trop d’étapes, trop d’échelons complexes » et souhaiterait « un allègement des charges plutôt qu’un mécanisme en deux temps avec un contrôle fiscal à la clé. »

Mais l’homme loue néanmoins le soutien de Bpifrance. « La France est innovante, les entreprises font preuve de polyvalence de pragmatisme et me semblent plus affûtées que leurs voisines européennes et il faut s’en réjouir », ajoute-t-il. Un avis partagé par Alain Molinié, d’AwoX. « La France est très bien outillée et mène une vraie politique de financement de l’innovation et c’est, dans ce domaine, une sorte de paradis. »Voilà au moins une occasion de se réjouir !

Auteur : Tiphaine Thuillier

Source : lentreprise.lexpress.fr

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