Article de presse

Le secret des inventeurs de génie


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Le secret des inventeurs de génie

Steve Jobs, Elon Musk et Thomas Edison sont connus pour exceller dans l’invention de nouveaux produits. Le grand public ignore peut-être qu’ils maîtrisent surtout l’art de concevoir les écosystèmes qui les accompagnent.

Thomas Edison, Steve Jobs, ou plus récemment Elon Musk ont tous été considérés comme de grands innovateurs ayant révolutionné plusieurs industries. L’énergie et la communication pour Edison, l’informatique et la téléphonie pour Jobs, l’automobile et l’aérospatiale pour Musk.

On pourrait avoir deux lectures de leurs succès. La première est que ces inventeurs seraient des génies venus d’une autre planète ayant des capacités supérieures. La seconde, moins fantaisiste, serait que ces trois hommes avaient la bonne recette, la bonne manière de s’y prendre quant à la construction d’un plan de bataille pour disrupter ou créer une industrie.

L’étape qui a manqué à Nokia, General Motor et Swan

Pour comprendre l’apparition d’une innovation, trois axes majeurs sont à prendre en compte. Le premier concerne la conception de l’invention elle-même. Dans le cas de Jobs, par exemple, transformer le téléphone classique en un téléphone-ordinateur muni d’applications (l’iPhone). Le deuxième axe concerne la transformation des moyens de conception de l’entreprise et de ses compétences. Dans le cas d’ Apple, il s’agissait de se doter de moyens d’un monde nouveau pour l’entreprise : la téléphonie.

Déjà ces deux axes, bien qu’évidents sur le papier, sont très complexes à mettre en œuvre, mais restent cependant insuffisants pour disrupter une industrie. En effet, aujourd’hui on le sait, l’entreprise de Steve Jobs n’a pas été la première à penser et concevoir des smartphones, Nokia le leader mondial incontesté des années 2000 en avait développé des dizaines de modèles. De même, General Motor ou encore Nissan sont deux entreprises ayant commercialisé des modèles de voitures électriques dans les années 90, quand Elon Musk n’était encore qu’adolescent. Aussi, Swan, un inventeur anglais, avait conçu l’ampoule à incandescence avant Thomas Edison.

Alors, comment se fait-il que ce ne soit pas Nokia, GM ou Swan qui aient connu le succès alors qu’ils avaient eux-mêmes pensé et développé des inventions du même type que Jobs, Musk ou Edison ? La raison se cache derrière une activité d’innovation qui est bien souvent oubliée par les entreprises : la conception de l’écosystème, le troisième axe.

L’invention précède l’écosystème, pas l’inverse

L’écosystème d’une entreprise comprend l’ensemble de ses partenaires, ses fournisseurs, son réseau de distribution, ses clients ainsi que le système légal dans lequel elle s’inscrit. Bien souvent, on oublie que, contrairement à la nature, dans le monde de l’artificiel (toutes les choses créées et imaginées par l’homme), l’invention précède l’écosystème.

Si on prend l’exemple de l’aéronautique, les fournisseurs de pièces, les aéroports, les normes aéronautiques ne sont pas des éléments auxquels les avions se sont adaptés, mais, bien au contraire, qui ont été créés parce que l’objet avion a été imaginé.

Or, une idée reçue dans le monde de l’innovation conduit à penser qu’il faudrait imaginer, prospecter ce que pourrait être l’écosystème de demain pour en déduire quelles seraient les innovations les plus adaptées. Pourtant, c’est bien le phénomène inverse qui s’opère.

L’innovation ne fait pas tout

Plus une innovation est disruptive, moins elle a de chance d’être adaptée à l’écosystème dans lequel elle s’inscrit. C’est un peu l’image des boîtes à formes pour enfant où il faut faire rentrer des pièces carrées dans des trous carrés, des rondes dans des ronds…

Deux positions s’offrent à l’innovateur. La première est la plus passive, elle consisterait à transformer son innovation jusqu’à ce qu’elle soit adaptée à l’écosystème – travailler sur la forme pour qu’elle rentre dans le trou. La seconde consisterait à penser en même temps l’innovation et son écosystème. Travailler à la fois sur la forme de la pièce et sur la forme du trou qui pourra l’accueillir.

Quand on étudie les logiques de nos trois grands innovateurs, se révèle leur travail intensif pour concevoir l’écosystème. Steve Jobs a, dès le départ, imaginé ses produits comme des produits non finis qui seraient complétés par des applications développées par des tiers.

De son côté, Elon Musk savait précisément que les conditions d’existence de la voiture dépendaient du maillage énergétique du territoire. Il a donc pensé à la fois les nouveaux modèles de voitures électriques et le réseau de recharge pour ses véhicules.

Concernant l’ampoule incandescente, Thomas Edison s’est imposé comme leader de ce domaine en concevant en même temps l’infrastructure de distribution électrique, la douille standard pour connecter l’ampoule ainsi que l’ampoule elle-même.

Cette facette des grandes « success-stories » est souvent racontée après coup, une fois que l’innovation a été un succès. Cependant, aujourd’hui, peu d’approches pour l’innovation intègrent la conception de l’écosystème de manière intrinsèque.

Pourtant, l’innovateur qui souhaite vraiment bouleverser une industrie ou disrupter un secteur devra, dans son processus de conception, se poser la question de l’écosystème en même temps qu’il pensera son produit ou service. Sinon, il risquera de se faire doubler par celui qui le fera…

Auteur : Frédéric Arnoux est co-fondateur de Stim

Source : www.lesechos.fr

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