Règlement sur le brevet communautaire – Origines et état actuel


L’agitation récente autour du brevet communautaire trouve sa source en 1997 lorsque, suscitée par des groupes d’intérêt, une large procédure de consultation a été lancée par la Commission en vue de la publication d’un livre vert et d’un papier subséquent reprenant les différentes initiatives prises par la Commission. La proposition d’un brevet communautaire qui ne soit pas onéreux, mais à la fois pratique et exécutoire a depuis lors bénéficié de l’appui politique et s’est fait plus pressante au Sommet de Lisbonne en 2000 au point de devenir une des priorités-clés de l’Union Européenne pour devancer économiquement les Etats-Unis en 2010. Sans la création d’un tel droit, certains estimaient que l’Europe souffrirait d’un désavantage concurrentiel en terme d’investissements en matière de recherche et de développement technologique.

En Août 2000, La Commission a présenté formellement sa proposition de Règlement du Conseil sur le brevet communautaire, à adopter selon une procédure de consultation qui est utilisée dans les matières pour lesquelles la communauté ne s’est pas vue attribuer de compétences spécifiques mais dans lesquelles l’action communautaire s’avère nécessaire pour réaliser les objectifs du Traité de Rome. C’est le cas notamment de toute la législation en matière de Propriété Intellectuelle pour laquelle le Traité n’attribue pas de compétence spécifique aux Communautés Européennes (à l’exception notable des compétences externes comme la négociation d’accords internationaux). Cependant, cette procédure requiert l’unanimité au sein du Conseil. Cette unanimité est essentielle car tant que toutes les États membres ne seront pas pleinement satisfaits par la proposition, celle-ci ne sera pas adoptée. Or, la plupart des questions posées par la proposition sont des questions politiques à fortes connotations  » nationales « .

Le Conseil a envoyé une proposition de Brevet Communautaire au Parlement et au Comité économique et social (CES) en septembre 2000. Bien que l’avis du CES ne soit pas obligatoire dans ce cas-ci, il a été jugé opportun étant donné la grande importance de la proposition pour le monde des affaires. Cet avis a été publié en Mai 2001, renvoyant la proposition de la Commission mais exprimant des craintes au sujet des procédures d’exécution, en particulier en ce qui concerne l’accès à la justice par les petites et moyennes entreprises (PME). Pendant ce temps, Le Comité Affaires Juridiques du Parlement Européen a débattu du projet de rapport et rendu un rapport final le 26 février 2002. Le Parlement dans son ensemble a accepté la proposition et mis sur la table des propositions de modifications comme par exemple de la position des bureau nationaux de brevets et les langues utilisées dans le nouveau régime.

Actuellement, les discussions ont donc lieu uniquement au niveau du Conseil. Un texte de compromis présenté par la Présidence espagnole a d’ailleurs été débattu le 21 mai 2002 dernier. Le Conseil n’est cependant pas tenu par le temps pour atteindre un accord acceptable pour tous.

Quatre questions restent controversées :
(i) le tribunal compétent et le système judiciaire applicable ;
(ii) la ou les langues utilisées ;
(iii) le rôle des bureaux nationaux de brevets ;
et (iv) la participation à la Convention de Brevet Européen ;
les deux premières questions sont les plus critiques.

Si l’on prend en compte la considérable importance que les états membres attachent à leur système juridictionnel, le Conseil doit continuer ses discussions sur le sujet, sur la base d’une nouvelle contribution de la commission. L’essentiel du débat tourne autour de la question de savoir si l’on doit opter pour une Cour européenne centrale en matière de brevets communautaires et si c’est le cas, sur la forme qu’elle doit adopter. Certains états proposent des juridictions de premières instances à un niveau national, mais cette solution est inacceptable pour de nombreux utilisateurs de brevets en raison de la propagation de l’expérience et de l’inexpérience, à travers les cours et tribunaux de l’Union Européenne dans les matières de brevet. Il existe des craintes que la valeur de droits sur un brevet puisse être perdue dans un tribunal doté d’une expérience limitée sur le sujet.

En ce qui concerne la ou les langues à être utilisées, l’Office Européen des Brevets (OEB) qui serait l’office chargé de l’octroi du brevet communautaire, travaille actuellement dans trois langues (l’anglais, le français et l’allemand) Une demande peut être déposée dans chacune de ces trois langues mais les revendications doivent être traduites dans les trois langues. Au sujet de l’exécution, cependant, un traduction doit être faite dans la ou les langue(s) appropriée(s) auprès des bureaux nationaux, ce qui représente un poids financier significatif.

Atteindre un compromis sur cette question est politiquement difficile. Il existe des pays dans lesquels une grande partie de la profession en matière de brevet gagne sa vie à travers des traductions. Dans d’autres pays, la décision d’abandonner leur langue n’est pas facile à prendre. Mais un des objectifs essentiels du futur Règlement est de réduire les coûts pour une demande de brevet et les frais de traductions doivent être réduits.

Selon les diverses propositions, on comptera une seule langue, les trois langues de l’OEB, ou même les 11 langues officielles de l’UE (qui passeront bientôt à 19!). Le Parlement européen a aussi suggéré l’utilisation du régime adopté pour la marque communautaire qui permet de déposer une demande dans n’importe laquelle des 5 langues ; cette langue étant choisie pour toute la procédure dont notamment l’opposition. Cela apparaît encore impraticable pour le brevet communautaire en raison du nombre élevé de texte et parce que l’OEB devra travailler dans deux nouvelles langues au moins.

Un compromis raisonnable doit être atteint; dans l’hypothèse contraire, nous allons finir avec un brevet qui est onéreux à obtenir et lourd à maintenir. Les utilisateurs voteront avec leurs portefeuilles, et leurs pieds, et ne vont simplement pas l’utiliser ce qui réduirait à néant toutes les aspirations de l’Union Européenne.


En savoir plus sur Invention - Europe

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

C'est à vous !

search previous next tag category expand menu location phone mail time cart zoom edit close