Attestant de la propriété intellectuelle d’une invention, les brevets sont devenus de vraies armes entre les fabricants high-tech. Économie juteuse, le marché des smarphones attise la guerre des marques…
Les marques se sont toujours écharpées autours de leurs brevets. Le plus souvent déposés auprès de l’Office Américain de la Propriété intellectuelle (USPTO), l’équivalent de l’INPI en France, les dits brevets attestent de la propriété d’une découverte ou d’une invention. Ambiance : « c’est moi qui l’ai fait » ! Quiconque voudra ensuite recourir à la technologie décrite dans le brevet devra s’acquitter de royalties auprès de l’inventeur. Le strict principe de la « propriété intellectuelle »… On n’ose imaginer les millions de dollars engrangés à ce titre par Sony et Philips, inventeurs du compact disc en 1979…
Apple attaque Samsung qui… attaque Apple
« Picasso disait : les bons artistes copient, les grands artistes volent ». Évoquant le génial artiste en 1996, un certain Steve Jobs donnait le ton des années numériques qui allaient suivre. Concurrence oblige, les firmes d’électronique grand public vont toutes tenter d’imposer de nouvelles technos à… grands coups de brevets. On se souvient de la bataille acharnée qui fit longtemps rage entre Toshiba et son HD DVD et Sony et son Blu-ray disc… avant que le premier jette l’éponge. Ce type de combat est aujourd’hui devenu quasi quotidien entre les fabricants de smartphones. Pas étonnant : le marché, est estimé à 450 millions d’appareils vendus dans le monde en 2011 (source : IDC). Ainsi, pas une semaine sans qu’un constructeur ne dépose plainte contre un autre devant l’International Trade Commission (IOTC).
Fait marquant des dernières semaines, les accusations d’Apple contre Samsung. Document de 38 pages à l’appui, la marque à la pomme reproche à son concurrent sud-coréen d’avoir violé 10 de ses brevets et copié (jusqu’à l’emballage des produits), ses iPhone4 et iPad. Il faut dire que la ressemblance est troublante. « Plutôt qu’innover et développer sa propre technologie et un style Samsung unique pour ses smartphones et tablettes, Samsung a choisi de copier la technologie, l’interface utilisateur et le style innovant d’Apple dans ces produits de contrefaçon. ». Parole de Steve Jobs ! Riposte immédiate : Samsung a accusé Apple de copier ses technologies sans fil…
Autre passe d’armes récente, celle entre Sony Ericsson et l’équipementier chinois ZTE. Début avril, le premier a traîné le second en justice pour violation de brevets. « Nous leur demandons de signer des accords de licence pour les brevets qu’ils utilisent. Nous considérons qu’il est juste que tous ceux qui utilisent des brevets aient à signer des accords et à payer », indiquait le groupe suédois. Réponse du berger à la bergère : au bout d’une semaine, ZTE a attaqué Sony Ericsson à propos de ses infrastructures réseaux mobiles. Ambiance…
Apple attaque HTC… qui attaque Apple
Les exemples de ce type sont légions, l’année 2010 ayant été particulièrement riche en échanges de Scuds entre fabricants. Nokia (10 000 brevets en poche) est entré en guerre contre Apple (5000) pour violation de brevets autour de la 3G, du Wifi, de la photo numérique, de la gestion d’énergie… Kodak et Samsung qui s’étripaient autour de la détention de brevets se sont finalement entendus autour d’un échange de technologies (on parle de « licences croisées »). Apple a attaqué HTC pour la violation d’une vingtaine de brevets.
Steve Jobs, jamais avare d’un petit tacle, a alors indiqué : « nous pensons que la compétition est chose saine, mais nos concurrents seraient inspirés de créer leur propre technologie, pas de voler la nôtre ». Et pan ! HTC n’a pas tardé à monter au front pour demander le retrait du sol américain de l’iPad et de l’iPhone qui, selon le Taïwanais, violeraient certains de ses brevets… Toujours en 2010, Motorola a accusé RIM de lui avoir subtilisé cinq brevets autour de l’ergonomie de ses appareils, etc.
Le brevet comme arme offensive et défensive
Un simple jeu du « c’est toi le chat » ? Non, car par-delà ces imbroglios juridiques se cache une véritable guerre économique dans laquelle la bataille autour des brevets est aussi une arme. Les experts en attestent : les attaques d’Apple visent souvent sans le citer un concurrent encombrant, en l’occurrence Google et son système d’exploitation Android. Retarder des sorties, prendre le leadership sur une technologie, contrarier le dynamisme d’un rival mais aussi toucher des revenus à la suite d’accords ou de procès : beaucoup de motivations apparaissent en filigrane.
«Les brevets sont de plus en plus utilisés de manière défensive : vous préparez des missiles pour les nouveaux entrants sur le marché en les forçant à monnayer leur présence. Vous ne pouvez pas les empêcher d’être actifs, mais vous le leur faites payer cher», décrypte Michel Jaccard, avocat à Genève et à Lausanne (source : letemps.ch).
Plus de 800 brevets déposés quotidiennement
Contre toute attente, ce ne sont pas les fabricants de smartphones qui ont déposé le plus de brevets l’an passé. Selon IFI Claims Patent Services, l’entreprise la plus innovante ne serait autre qu’IBM avec 5896 dépôts de brevets.
Mais rien n’indique si ses brevets donneront effectivement naissance à de nouveaux produit… Suivent Samsung (4551), Microsoft (3094), Canon (2552), Panasonic (2482), Toshiba (2246), Sony (2150), Intel (1653), LG Electronics (1490) et HP (1480). En un an, 219 614 brevets ont ainsi été déposes aux Etats-Unis, soit 829 par jour. Les services juridiques des marques d’électronique n’ont pas fini de se faire des cheveux…
Auteur : Christophe Sefrin
Source : www.techyou.fr
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