Fin du suspense (sadique) volontairement créé par l’article d’hier alors qu’on avait la réponse !
Les États membres ont réussi à s’entendre sur le coût du futur brevet unitaire européen qui pourrait entrer en vigueur en 2016. Ce point était déterminant pour que les entreprises – et en particulier les PME – choisissent entre le brevet européen « classique » et le brevet unitaire. Car ce dernier portant systématiquement sur l’ensemble des 25 États, son coût est à comparer avec le nombre de pays dans lesquels l’entreprise avait l’intention de protéger son produit : selon sa stratégie de dépôt, le nouveau brevet sera plus ou moins intéressant pour elle.
La décision du 25 juin 2015 fixe le coût du brevet unitaire à moins de 5.000 euros pour une protection de 10 ans (c’est la durée de vie moyenne actuelle d’un brevet européen) dans 25 États, ce qui correspond à ce que coûte actuellement un brevet européen « classique » dans seulement 4 États. Si une entreprise, en fonction de son activité commerciale, dépose ses brevets généralement dans cinq pays, donc s’acquitte de cinq annuités nationales, elle en sort donc gagnante. Largement plus, bien sûr, si elle avait prévu de couvrir l’ensemble des pays concernés : le brevet classique lui coûterait 30.000 euros, un tarif que seul certains grands groupes comme Samsung peuvent s’offrir.
Et cet avantage sur les taxes est à ajouter à l’économie déjà attendue au niveau main d’œuvre pour toutes les démarches administratives : constitution de dossiers en plusieurs langues, procédures de paiement mais aussi et surtout les multiples traductions. Pour couvrir avec le système actuel l’ensemble du territoire de l’Organisation européenne des brevets (OEB), l’inventeur doit obtenir 38 validations dans des pays parlant 29 langues. Enfin, la sécurité juridique sera améliorée et les litiges plus faciles à débrouiller car il est prévu un système unique de règlement des litiges.
Les 25 États membres signataires de l’accord (donc ceux où le brevet unitaire sera valable) sont les membres de l’Union Européenne à l’exception de l’Espagne, de l’Italie et de la Croatie (qui ont refusé pour des raisons linguistiques). La demande devra être rédigée dans l’une des 3 langues officielles : l’allemand, l’anglais et le français. Il sera ensuite procédé à une traduction automatique.Rappelons que la procédure devant l’Office européen des brevets (OEB) sera la même au départ, que l’on ait en tête de déposer un brevet européen « classique » ou un brevet unitaire. Ce n’est qu’à la fin de la procédure que le demandeur devra décider s’il souhaite une validation pour certains pays de l’Union européenne seulement (brevet classique) ou dans les vingt-cinq États signataires de l’accord sur le brevet unitaire (effet unitaire).
Le but de ce tarif très attractif (on s’attendait à plus élevé) est clairement de pousser les entreprises européennes innovantes à attaquer l’ensemble du marché européen, à augmenter la cohésion de ce dernier et à aboutir à des volumes de production plus pertinents économiquement. Il s’agissait aussi de rééquilibrer les chances des entreprises de l’UE face à leurs homologues des États-Unis et du Japon où les brevets sont beaucoup moins onéreux.
Mais on peut espérer encore mieux pour les PME car Bercy a indiqué le jour de cet accord, 25 juin, que le ministre de l’Economie Emmanuel Macron souhaitait, dans le prolongement de l’accord, que « des mesures spécifiques soient prises en faveur des PME, pour réduire leurs coûts de dépôt de brevets ». Voir l’article d’hier concernant la position d’Axelle Lemaire sur ce même point.
Le brevet unitaire devrait entrer en vigueur en 2016. C’est en tout cas ce qu’a annoncé Benoît Batistelli, président de l’Office européen des brevets (OEB), en marge du Prix de l’inventeur européen. Un calendrier peut-être un peu optimiste quand on sait qu’il a déjà fallu trente ans à cette idée de brevet unitaire européen pour devenir (quasiment) réalité. Les observateurs le verraient plutôt entrer en vigueur en 2017.
A cette date, l’inventeur pourra donc choisir en quatre types de brevets :
* brevet national (auprès de l’INPI pour la France)
* brevet européen suivi du choix de certains pays (brevet européen actuel)
* brevet européen suivi du choix « unitaire »
* brevet international PCT
Auteur : JMD – Source : synthèse de très nombreux articles sur le sujet
A lire également :
* une note de présentation du brevet unitaire faite par un CPI en 2013
* le communiqué de presse de l’OEB