Suite à un accident de travail, Yves, maçon de 56 ans, cherche une façon simple de se faciliter la vie sur les chantiers. Aujourd’hui, son « harnais de force » intéresse des entreprises du CAC40.
Un peu comme dans les « success stories » à l’américaine, tout commence par une mésaventure, un constat et une idée simple.
Début 2012, Yves Labbé-Laine (52 ans), maçon depuis 35 ans à Vinon-sur-Verdon, soulève comme tous les jours seaux et sacs de ciment… Jusqu’au sac de trop.
Allongé par la douleur, le diagnostic est posé: lombalgie. ça, c’est pour la mésaventure. « Un mois couché à ramper au sol », se souvient Yves. Quatre longues semaines de convalescence pendant lesquelles il cogite : « En pensant à comment j’aurais pu éviter ça, je me suis dit qu’il existait de quoi soulager après coup, comme les ceintures chauffantes, mais rien pour aider au quotidien tous ceux qui passent leurs journées pliés en deux ».
Rien, en tout cas, d’accessible ou d’abordable pour la majorité des entreprises. Voilà pour le constat. L’idée simple ne met pas longtemps à suivre.
Deux élastiques et c’est tout
À ce moment-là, les seuls appareils existants pour aider un ouvrier à soulever des charges, sont des « exosquelettes », sorte de bras et de jambes mécaniques fixés au corps.
Problème ? Ils sont lents, encombrants et surtout chers – au moins 2.000 euros pièce, sans compter l’entretien -. « Pourtant le principe même de la machine est simple » s’étonne Yves. À tel point que le maçon va le reproduire… Avec deux gros élastiques, simplement cousus pour faire une sorte de bretelles qui descendent jusqu’aux genoux. Le « harnais de force » est né.
« ça agit un peu comme un ressort, explique l’ex maçon. Quand on se baisse, l’élastique se tend et emmagasine de la force. Quand on se relève, cette force aide les muscles du dos, comme un muscle synthétique. Du coup, les lombaires sont moins sollicitées ». Sûr du potentiel de son invention, le maçon vinonnais décide alors de troquer son casque de chantier pour le costume cravate.
De maçon à patron
Il convainc quelques amis et une banque brignolaise de l’aider à financer son projet, fabrique un prototype, monte sa société, dépose un brevet et se lance dans une tournée des salons professionnels.
Tout s’enchaîne alors très vite. Primé en 2014 aux trophées « expoprotection » de Paris, il est d’abord repéré par le « Monsieur sécurité au travail » des magasins Leclerc.
Séduit par la simplicité et le faible coût du harnais – moins de cent euros – ce dernier décide de le tester dans l’un de ses entrepôts début 2015. Suivront Intermarché, Carrefour, But, Ikea, Airbus et même la SNCF, qui souhaite en équiper ses équipes de maintenance sur les rails.
1.200 pièces au total, toutes fabriquées en France, dans le Nord. Des essais décisifs qui, s’ils sont transformés, promettent à Yves de très gros contrats.
Voire le jackpot, puisque l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail (INRS) évalue en ce moment les bénéfices du dispositif. Si les résultats sont concluants, le port du « harnais de force » pourrait alors devenir obligatoire pour tous les manutentionnaires et ouvriers en France.
Une possible révolution dans le domaine de la sécurité au travail, née dans le Var d’une lombalgie et de deux élastiques.
Auteur : Steve Claude
Source : www.varmatin.com