Ce modèle de boule Obut a été déposé auprès de l’INPI en 2004.
Les inventions industrielles ne sont pas les seules créations à être concernées par la propriété intellectuelle. Les modèles et les marques peuvent également être déposés. Une démarche plus facile qu’une demande de brevet, même si la première fois mérite un accompagnement.
Saviez-vous que, lorsqu’à l’heure de l’apéro, vous soupesez votre boule de pétanque au joli motif quadrillé, vous tenez dans votre paume un joli condensé de design, enregistré par la société Obut le 15 novembre 2004 dans la Base de données des dessins et modèles français de l’INPI, sous le numéro 045434 ? Voilà qui invite au respect avant de la lancer n’importe comment… Et à réaliser qu’il n’y a pas que les inventions techniques qui peuvent faire l’objet d’une protection juridique. Les modèles des objets peuvent également être déposés, dans une trentaine de classes différentes. Pour la France, cela se fait à l’INPI ; pour l’Europe, à l’Office de l’Union européenne (EUIPO) ; et pour le reste du monde, à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Dans les banques de données de ces organismes, on trouve aussi bien des bijoux, des lunettes, que… des tracteurs !
En 2016, 53.689 dessins et modèles ont été déposés à l’INPI. Pour le néophyte, le dépôt d’un modèle est une démarche nettement moins complexe qu’une demande de brevet industriel. Il importe néanmoins de s’interroger sur sa nécessité. « Par défaut, un modèle est protégé par des droits d’auteur, à compter de sa première création, rappelle Cécile Pires, secrétaire de la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle (CNCPI).
L’intérêt de le déposer est de ne pas avoir à chercher une multitude de preuves d’antériorité en cas de litige. En plus, un modèle déposé peut être inscrit dans le bilan d’une société. C’est un actif valorisable, contrairement au droit d’auteur ». Un modèle est renouvelable tous les cinq ans, pour 25 ans maximum. Son certificat d’enregistrement s’obtient en trois à cinq semaines (idem par l’EUIPO, plus d’un an à l’international selon les pays choisis).
Protection de 25 ans maximum pour un modèle, mais à l’infini pour une marque
Les taxes de l’INPI ne dépassent pas une centaine d’euros. En faisant appel à un cabinet de conseil, le coût total de l’opération revient aux alentours de 500 euros. Car il y a des subtilités à connaître. « Il est préférable de déposer des dessins ou des photos en noir et blanc, conseille Cécile Pires. S’ils sont en couleurs, le modèle sera enregistré dans l’unique couleur représentée. En noir et blanc, la protection couvre tout le nuancier ! »Quant à déposer une marque, cela relève encore d’une autre logique juridique. Il faut songer à déposer ses homonymes, et à enregistrer la marque dans tous les secteurs d’activité qu’elle pourrait être amenée à couvrir.
La soie naturelle de Sericyne.
La jeune entreprise Sericyne est récemment passée par cette étape. « Nous avons été aidés par un avocat spécialiste ; c’est préférable pour une première fois, confie Constance Madaule, cofondatrice de Sericyne avec Clara Hardy, qui utilise des vers à soie pour leur faire tisser des pièces de soie 100 % naturelle, utilisées dans le luxe. Puis nous avons déposé notre nom et notre logo, réunis sur une même demande. C’était nécessaire pour que le nom soit accepté. » En effet, la séricine est le nom d’une protéine naturelle produite par le vers à soie. Or la loi interdit de s’accaparer un nom d’usage courant pour en faire une marque. Sauf s’il est apposé à un logo caractéristique, à fortiori pour un secteur d’activité éloigné de sa définition.
Ainsi, le nom Lait ne peut être déposé tout seul pour une activité laitière. Mais s’il est associé à un logo, pour des tee-shirts blancs par exemple, la démarche est acceptée. Par ailleurs, il faut retenir qu’il peut être intéressant d’associer un modèle et une marque sur la même demande de dépôt. Pourquoi ? Car le dépôt de la marque est renouvelable tous les dix ans, jusqu’à l’infini, alors que celui de modèle est limité à 25 ans. En associant les deux, le modèle bénéficie de la même protection que la marque, et évite de tomber un jour dans le domaine public…
Auteur : Henri de Lestapis – Source : www.lesechos.fr